Vous avez jusqu’au 11 mai (bientôt, donc) pour découvrir l’exposition Soyez les Bienvenus, aux Champs Libres. L’artiste plasticienne Fanny Bouyagui nous propose une exposition poignante sur les migrants africains, prêts à tout pour se rendre en Europe. Fanny Bouyagui a mené un véritable travail d’investigation sur deux ans, recueillant une multitude de témoignages de ces personnes migrantes.
Migrants d’hier, migrants d’aujourd’hui
Le travail de Fanny Bouyagui a pour point de départ l’expérience de son père, Baré Bouyagui. Originaire du Sénégal, celui-ci débarque en 1957, dans le port de Marseille. Baré Bouyagui est accueilli à bras ouvert, se marie rapidement à une française, trouve du travail. Qu’en est-il aujourd’hui pour les migrants africains souhaitant venir en Europe ?
Cinquante ans après l’arrivée de son père en France, Fanny Bouyagui confronte l’expérience de celui-ci à celle des migrants africains, qu’elle est partie rencontrer en 2009 à Agadez, au Niger, point de départ des migrations vers l’Europe. Qu’ils viennent du Togo, du Ghana, du Sénégal, du Burkina Faso, tous veulent la même chose : travailler, gagner de l’argent pour en envoyer à leur famille, avoir une vie meilleure. Seulement, tous sont bercés par l’illusion que les migrants réussissent comme le père de Fanny Bouyagui.
L’artiste poursuit son investigation, en 2010, et se rend en Italie, à Castel Volturno, près de Naples. Une ville poubelle que Fanny Bouyagui ne manque pas de représenter dans l’exposition, avec des murs de déchets compressés ou encore une montagne de sacs poubelles. Véritable étape dans la longue traversée des migrants, Castel Volturno est peuplée d’immigrants exploités par les mafias italiennes, travaillant pour quelques euros par jour (s’ils arrivent à trouver un travail) ou contraints à la prostitution. Beaucoup d’entre eux souhaitent rentrer dans leur pays, mais ne peuvent pas. L’envoie d’argent à leur famille restée en Afrique les entraîne dans « une spirale de laquelle ils ne peuvent que difficilement s’échapper », précise Fanny Bouyagui. Rentrer chez soi, c’est la honte, c’est la déception de la famille.
La parole aux migrants
Lors de ces deux expéditions, l’artiste recueille des interviews vidéos, des objets, des photographies, ou encore des articles de presse. Autant de témoignages qu’elle intègre à l’installation plastique de l’exposition, participant à l’immersion dans la traversée des migrants.
Les interviews filmées des migrants africains permettent de donner la parole à ces personnes pleines d’espoir à Agadez, ou en souffrance, une fois arrivées en Italie. Ces migrants ont tous un prénom, un visage, aspirent à une vie meilleure, digne d’un être humain. Mais Fanny Bouyagui, ne tombe jamais dans le pathos. Il s’agit de rendre compte de réalités, aussi terribles soient-elles, mais avec justesse.
Les témoignages vidéos fusent et tournent en boucle. Les paroles s’entremêlent, formant un nuage sonore quelque peu oppressant mais nous plongeant dans « une atmosphère générale, très immersive », souligne l’artiste. Une atmosphère à la fois saisissante et bouleversante, car l’exposition ne traite pas tant de l’immigration d’un point du vue politique, mais davantage de manière humaine.
Vous avez donc jusqu’au 11 mai pour voir cette exposition, aux Champs Libres. Une grosse claque, certes, mais à ne surtout pas louper !
Soyez les Bienvenus – Fanny Bouyagui
Aux Champs Libres à Rennes
Jusqu’au 11 mai