Interview de Jennifer Cardini

 

Artiste emblématique de la scène électronique hexagonale, Jennifer Cardini nous a fait l’honneur de nous présenter un dj set à l’Etage au Liberté mercredi dernier. Entrant en scène en dernière partie, elle a assuré avec brio la clôture de la Fake, redorant par la même occasion le blason des soirées Techno rennaises, plutôt rares ces derniers temps. C’est avec le sourire qu’elle nous a reçu à son hôtel pour une interview avant le début de la soirée.

Pour commencer, on voulait savoir comment tu es devenue Dj ?
En fait, je sortais en club et à l’époque il n’y avait pas de compilations mixées donc on était obligé d’acheter des vinyles. Pour écouter la musique que l’on aimait, on n’avait qu’une solution : acheter des Platines et des vinyles. De fil en aiguille, j’ai commencé à rencontrer des gens et à mixer à droite et à gauche, puis j’ai eu ma résidence au Rex. Mais je ne me suis pas dit, je vais être DJ !

Toi qui as tourné à l’étranger, peux-tu nous expliquer l’évolution de la Techno en France ?
En France nous avons plus une culture de discothèque, alors que dans un pays comme l’Allemagne il y a plus une culture rave. Les Allemands ont été influencés par la chute du mur de Berlin. Le concept était de rassembler la jeunesse de l’Est et de l’Ouest dans des endroits comme des squats. Par contre le mouvement rave qu’il y a eu en France dans les années 1990 est plus une culture de discothèque, les gens sortent le samedi soir, ils prennent une table et une bouteille. Les Allemands sont capables d’investir pleinement des lieux, comme le dernier étage d’une tour. Nous n’avons pas cette capacité là. En Allemagne, la musique électronique a permis de rassembler la jeunesse, influencée par des groupes comme Kraftwerk. En France, il n’y a pas cette force, on n’est pas très hangar !

Dirais-tu que ta musique à connu une évolution au fil des années ?

Jennifer Cardini Live Mix – MARCH 2011 by Correspondant
Il y a forcément une évolution dans la musique électronique. Il y a plus de fusion, il y a de vrais instruments parfois même de la guitare ! Ça a évolué depuis la période où je mixais du Redplanet ou des trucs de Detroit avec des synthés analogiques. Par contre, il y a un mouvement qui ne me plaît pas trop, la vague minimale, une autoroute pas possible qui manque parfois d’émotions. Mais ça, tu ne peux rien y faire.

Qu’est ce qui t’a poussé à faire le projet Rexperience ?
C’est le Rex qui me l’a proposé, il demande à tous ses résidents ! Des résidents comme Laurent Garnier vont peut-être le faire, je lui demanderai demain (rire)

Qui sont tes mentors ?
Garnier, mais je n’aime pas trop le mot mentor… Certains artistes m’ont inspirée. Comme Maurizio ou Basic Channel. Également des cinéastes, pour l’esthétisme et la sensualité qu’ils proposent, ce qui se retrouve dans la musique.

Que ferais-tu si tu n’étais pas DJ ?
Je serais chef, comme ça je pourrais mixer des trucs ensemble !

As-tu remarqué une évolution Techno différente entre Paris et les autres villes de Provinces ?
Ce n’est pas comme en Allemagne : à Munich ça va être Gigolo Record et à Berlin Bpitch Control. Nous n’avons pas cette identité là ni par villes, ni par régions. En France, tout est concentré à Paris, mais Paris n’a rien à envier à Berlin ou Londres (Fabric). On a une programmation au Rex qui est quand même fantastique ! Par exemple, je jouais samedi à Paris, il y avait la Vilette Sonique, Motor city drum ensemble et Todd Terje au Showcase, moi je jouais avec John Daly et Darabi au social club et t’avais une soirée Infinéau Rex ! Donc les Parisiens sont souvent en train de râler alors qu’ils ont  quand même de beaux plateaux ! C’est même peut être un peu trop (rires). Après c’est une question politique aussi, il y a beaucoup de clubs provinciaux qui se prennent des fermetures administratives,  ou des arrêts comme à Nantes ! Et puis, tu as l’impression que le gouvernement a peur de sa jeunesse. La France n’est pas un pays permissif par rapport à l’Allemagne tu peux faire un barbecue dans un parc sans te faire arrêter. Je te mets au défi de faire un barbecue !

Jennifer Cardini Live Mix – MARCH 2011 by Correspondant

Quels sont tes projets pour l’avenir ?
Le label que je viens de monter « Correspondant », et je fais de la musique seule : j’ai fait pas mal de remix, dont un pour Chloé, un pour Battant sur kill the dj et Gundrun Gut, la meuf de Ocean club et Monica. Je viens aussi de faire un track pour la compile « Total 12 » chez Kompakt. J’avance doucement on va dire.

Comment t’es-tu retrouvée chez Kompakt ?
Ça s’est passé il y a dix ans grâce à la première compile que j’ai faite qui s’appelle « électronique culture » sur laquelle il y avait un nombre incalculable de Kompakt. Katapult les a invités au Rex et j’ai rencontré Michael et je suis rentrée dans l’agence en tant que dj il y a environ dix ans. Je les connais depuis très longtemps et j’habite dans la même ville qu’eux.

Selon toi qui sont les artistes à suivre ces prochains mois ?
Nhar, Darabi, moi (Rire) c’est ironique je te rassure ! Clément Meyer, Connan Mockasin , Thomas More, Krikor aussi…

Qu’est-ce que cela t’évoque si je te dis Pulp ? Rex ? Berghain ?
Pulp : la transpiration, les murs qui coulent, les murs humides, 5h30 du matin les bras qui se lèvent et puis mes amis.
Rex : le son, l’énergie, la puissance, l’intensité, même dans la cabine d’un coup quand l’éclairage s’allume et que tu vois la foule devant toi, ça fait bim !
Berghain : (rire) la solitude parfois…Je dirais la bonne humeur.

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Author: rennesacoupdecoeur

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